Je n’ai jamais vu d’aigle. Je n’en ai jamais entendu non plus, mes lecteurs.
Ce regret est tel qu’il me permet de dire que je n’ai jamais entendu le son de la vie, et par là même que n’ai donc jamais vécu.
L’aigle est le plus majestueux et invincible des animaux qui composent la Terre que j’habite, et son chant est la fiction d’un rebondissement sans fin et sans arôme qui empourpre mes joues jusque telle vos cœurs je devienne.
C’est un cri, de désespoir ou de lutte, de haine ou de chagrin, de violence ou de survie.
Et ce sont ces mots qui nous reviennent en tête quand on pense au son de la vie.
Car la vie, mes lecteurs, ma vie, et la vôtre, c’est le désespoir, la lutte, la haine, le chagrin, la violence et la survie.
La vie n’est pas très heureuse, si on se permet de nous accorder un infime temps d’analyse prétentieuse de tout ce qui la caractérise.
Vous me direz alors : comment vie peut être survie ?
Je vous répondrai que l’on ne vie que pour survivre, comme je vous l’ai déjà expliqué, le genre humain a tendance à aspirer vers un goût à la luxure du matérialisme pour que son après soit le meilleur possible, tant et si bien que le moment ou je vie ne m’intéresse guère, mais seulement la manière dont je vais continuer de vivre, autrement-dit ma survie.
En tant qu’humaine ayant réalisé cette vérité, la seule vérité qui ne soit en moi un postulat, je suis obligée d’oublier mon futur.
Je ne sais pas ce qu’est demain.
Je ne sais pas si demain je verrai un aigle, je vis au jour le jour.
Je peux mourir maintenant, comme vous le pouvez.
Mais en mourant, je me dirai que je meure, et que c’est normal, car je suis un être humain et qu’un être humain se doit de mourir car c’est la loi de l’univers, et qu’on ne peut la contredire.
Tandis-que que vous, vous vous direz que votre famille va être tellement triste sans vous, que vos enfants n’ont pas assez d’argent pour s’en sortir seuls, que vous n’avez pas eu le temps de voir un aigle.
Mais en cachant l’obscure réalité que je vous impose ici, nous sommes les mêmes, et on ne peut le nier, car si maintenant nous voyons un aigle, et nous l’entendons chanter devant la fenêtre, nous aurons tous sans exception, deux éventualités en tête : je suis heureux ou je suis mort.
Et finalement, l’un va-t-il sans l’autre ?
Aven Berger
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